Lettre d’info CQP N° 04
Commission Quartiers Populaires |
Lettre d’info CQP N° 04 Quartiers populaires, quelles améliorations ?Projet de loi de programmation pour la Ville et la cohésion sociale
Dans le cadre de la réforme de la politique de la ville annoncée par François Lamy, Ministre délégué à la ville à la rentrée 2012 et après quatre mois de concertation avec les acteurs de la politique de la ville qui a donné lieu au rapport et aux propositions du Comité Interministériel des Villes, il s’agit avec ce projet de loi de redéfinir et refonder la politique de la ville. Après une décennie de politiques en direction des quartiers, issues de la loi de 2003, le constat est sévère en terme d’inégalités territoriales et de concentration des difficultés sur certains territoires, comme le souligne par ailleurs le rapport de la Cour des comptes du 17 juillet 2012 : accroissement des inégalités face à l’emploi, hausse du taux de pauvreté en ZUS, concentration de difficultés sociales, dégradation de la qualité de vie et de l’environnement (pollution de l’air, bruit, précarité énergétique), moindre accès aux droits et aux services publics, discriminations, difficultés scolaires et déqualification. Prenant acte du fait que cet accroissement des inégalités témoigne de l’inefficacité et de l’inadaptation des instruments de la politique de la ville, la réforme proposée a ainsi pour objectif de réduire ces inégalités entre les territoires et d’améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers en difficulté. Le projet de loi a été présenté par François Lamy le 2 août dernier en Conseil des ministres. http://www.ville.gouv.fr/?francois-lamy-presente-son-projet
Cette réforme proposée de la politique de la ville répond à un certain nombre d’orientations fixées par le gouvernement.
Si ces orientations qui rompent avec la conception des gouvernements de droite de la politique de la ville vont dans le bon sens, une attention particulière devra être portée sur un certain nombre de points dans le cadre de cette réforme et de l’élaboration de la loi :
Faire des contrats de ville et des opérations de renouvellement urbain de véritables démarches de développement durable ?
Dans les dispositions de programmation, il faudra ajouter l’objectif de garantir un environnement sain (pollution de l’air, bruit notamment), un habitat de qualité (exigences environnementales et en matière d’énergie), mais aussi l’accès à la santé et aux transports collectifs.
Choix des critères pour définir la géographie prioritaire :
On ne peut, enfin, manquer de souligner, même si cela dépasse le cadre du projet de loi Lamy, les interférences résultant de la réforme territoriale, qui risque d’avoir un impact important sur la mise en œuvre sur le terrain de la nouvelle politique de la ville. On a fait part dans d’autres textes de notre inquiétude sur l’écart entre les délais importants que requiert la réforme de cette politique et l’attente des habitant/es des quartiers de voir améliorer très vite leur vie quotidienne.
Halima Menhoudj, Jean Lafont, Claire Monod et Marie-Line Théophile – Commission Quartiers Populaires d’Europe Ecologie / Les Verts Lettre d’info CQP N° 04 1-remarques sur ce qui est proposé dans le projet de loi 2-remarques générales sur ce que les associations de quartier ressentent et vivent 3-réflexions générales sur les conclusions qu’un écologiste (en l’occurrence, moi !) peut en tirer 1-le projet de loi -le projet de Lamy est utile et intéressant, dans sa manière de rendre plus simple et plus cohérente la politique de la ville… mais exclusivement tourné vers la technocratie et les élus (incompréhensible par le grand public –quel est son message ?- et illisible politiquement -quel son but ultime ?-) -« meilleure articulation entre renouvellement urbain et cohésion sociale ». Ah, bon ? avec le futur CGET (fusion de la Datar, du SGCIV et de l’Acsé dans un nouveau Commissariat général à l’égalité des territoires), avec à terme, la disparition de la « politique de la ville » dans un concept plus large « d’égalité des territoires ». Questions : a-cela remettra-t-il en cause en noyant la politique de la ville, dans un ensemble bcp plus large (et plus flou) mettant sur un même pied d’égalité « banlieues » et « campagnes » (pour faire vite), gommant près de 30 ans de réflexions et d’actions sur cette question centrale dans l’histoire de France : l’émergence de zones nouvelles, de populations nouvelles, de problèmes sociaux et économiques et politiques nouveaux, liés aux « banlieues » / « nouveaux quartiers populaires » ? b-(question déjà posée dans une note remise par moi) cela noiera-t-il l’Acsé, principal bailleur de l’action des associations dans les quartiers, comme la Halde a déjà été noyée dans le Défenseur des droits, avec le résultat que l’on sait : invisibilité de ce dispositif pour les victimes de discriminations notamment « ethnoraciales », et impossibilités de saisir cet organisme ad hoc acquis après des décennies de haute lutte, de crimes et de morts ? L’Acsé disparaîtra-t-elle dans un magma informe trusté par des bureaucrates ? L’Acsé, qui emploie des spécialistes des banlieues, sera-t-il subordonné à une nouvelle armada de fonctionnaires incompétents sur ces questions, et de spécialistes du « color blindness » français ?! Déjà, le passage du Fasild à l’Acsé était allé dans ce sens… Je rappelle que l’Acsé est passé en dix ans du soutien de 15 000 à 7000 associations. Une hécatombe. -30% de budget en 2010, -30% en 2011 pour l’Acsé (environ 500 millions / an contre dix fois plus pour l’Anru). Y aura-t-il rééquilibrage des budgets Acsé et Anru ? -« la mobilisation accrue des politiques de droit commun » : Ah, bon ? Je vous invite à lire les articles de Presse & Cité sur ce fameux droit commun et ce que ce gouvernement en fait (exemples de « SOS stages » de la Fédé des maisons des potes, et de la suppression du fonds d’expérimentation dédié aux médias de quartier, ou au durcissement des conditions de travail dans le milieu de l’insertion…) -« association étroite des habitants » à la politique de la ville. Attendons de voir : le projet actuel parle surtout de les associer au CNV. Avec sans doute un nouveau collège d’habitants en son sein. On est loin des mesures évoquées dans le rapport Mechmache-Bacqué (qui st les principales à défendre, à mon avis, pour des écolos) : création de « tables de quartier » avec un mode de désignation, une gouvernance et un financement originaux (sur un modèle canadien) ; et création d’une « plateforme » nationale regroupant ces « tables ». Mais ces combats st menés par des associations qui n’ont aucune visibilité, aucun soutien politique et qui sont économiquement fragilisées (notamment depuis un an –merci la gauche). 2-la situation politique globale dans les quartiers, telle que la vivent les acteurs qui y sont parmi les derniers acteurs civiques écoutés (les associations -je résume de manière un peu tranchante) : a-le nouveau gouvernement était assez demandeur de voir les associations faire des propositions sur la politique de la ville et faire émerger un nouveau discours et une nouvelle vision sur les quartiers, qu’il aurait bien volontiers relayé (notamment à l’occasion des 30 ans de la Marche pour l’Egalité). les associations en question ont été beaucoup écoutées, de manière bienveillante. Les interlocuteurs traditionnels et exclusifs (au quasi) de la gauche (la mouvance SOS racisme) a été détrônée dans ces consultations. Mechmache est devenu le nouveau porte-parole. b-les associations n’ont pas été capables de répondre aux attentes du gouvernement (ni chez François Lamy, ni chez François Hollande). Pourquoi ? Trop affaiblies, notamment, par dix ans de droite, par 30 ans de crise sociale et financière (et les divisions qui s’en sont suivies). Et trop lentes à réagir. Car… c-…il y avait une fenêtre de tir de un peu moins d’un an (septembre 2012 – juin 2013) pour répondre à ces sollicitations du gouvernement. Après, la loi Lamy (et les autres lois : logement, éducation etc.) étaient élaborées. Et en septembre 2013, on entrait dans une nouvelle séquence : les élections municipaleS. A partir de septembre 2013, il n’y a plus aucune consultation qui tienne, plus aucun risque pris : il faut sauver les élections ! La gauche (et le PS en particulier) se dit qu’il n’a quasi aucune voix à gagner dans les quartiers aux municipales, aux européennes, etc. et beaucoup de coups à prendre à l’extérieur si on se focalise trop sur eux, tant ces questions sont clivantes, qui plus est en période de nouvelle vague FN, en France comme eu Europe. d-le gouvernement pense que les associations n’ont plus aucune capacité d’entraînement dans les quartiers : naguère, elles étaient les sous-traitantes de l’action sociale d’un Etat-Providence déclinant et décentralisé, et de sa politique de la ville ; demain, il faudra arrêter de jeter de l’argent dans ce tonneau des Danaïdes : elles ne sont plus un amortisseur social, elles st devenues la variable d’ajustement indolore des économies budgétaires que l’Etat n’ose pas faire dans la fonction publique. Partout dans les cabinets ministériels résonne un seul et unique appel : « seule la lutte contre le chômage compte, que peuvent faire les associations pour la création d’emploi ? » Tout est mis sur les associations qui favorisent la création d’emploi, rien sur celles qui pompent des subventions (pour préserver le lien social et des activités non mafieuses dans les quartiers, je précise quand même). 3-conclusion écologistes : a-il faut soutenir les acteurs (comme Mechmache-Bacqué) qui se battent pour l’émergence d’une capacité de participation des habitants à la politique (de la ville, en particulier), autour de leurs projets de « tables » et de « plateforme », c’est le seul moyen d’aider à faire émerger, à terme, ce qui manque aux banlieues depuis 30 ans : des interlocuteurs réguliers pour les décideurs. Un « syndicat » des banlieues. Avec les financements évoqués par Mechmache-Bacqué (sur la réserve parlementaire, sur le financement des partis) ou par certains écolos (sur le financement de l’Anru) b-il faut se battre partout où cela est possible pour que l’Acsé (ou ce qui la remplacera) reste visible dans les quartiers (ou plutôt : le redevienne), et que son budget soit rééquilibré avec celui de l’Anru. Et donc prendre langue avec ses cadres pour écouter leurs propositions en la matière. c- il faut se battre pour la « péréquation » (et donc la DSU) et l’accès au « droit commun », qui me semblent les deux mamelles indispensables de la « déghettoïsation » des quartiers. d-il faut se battre pour le « verdissement » du PNRU (qui coûte plus cher aux constructeurs et à l’Etat, mais ensuite moins cher aux locataires et aux propriétaires) d-je me permets de renouveler l’intérêt que nous aurions à porter nos réflexions sur la place des quartiers ds la transition écologique (et donc à travailler autour de la note que j’avais produite il y a un an sur cette question) ! enfin, je me permets de vous suggérer de lire un certain nombre de productions de Presse & cité sur la situation des associations – enquête en 6 épisodes + un édito « leader » : http://www.presseetcite.info/journal-officiel-des-banlieues/dossier/societe/dossier-qui-veut-la-peau-des-assos http://www.presseetcite.info/journal-officiel-des-banlieues/societe/banlieues-de-la-republique-quelques-lueurs-despoir-dans-un http://www.presseetcite.info/journal-officiel-des-banlieues/societe/marches-lombre ) Erwan Rudy – Commission Quartiers Populaires d’Europe Ecologie / Les Verts |
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